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Candidats a duree indeterminee

Depuis sa naissance en 2001, la télé-réalité règne sur le petit écran. D’inexpérimentés à experts, les candidats sont passés maîtres dans l’art du reality show. Entre recyclage et sponsoring, certains surfent sur leur célébrité pour en vivre.

 

13 célibataires, coupés du monde, enfermés dans une maison et filmés 24h sur 24. Nous sommes en 2001 et Loft Story apparaît pour la première fois sur les écrans de télévision. Le succès que l'émission rencontre est inattendu et phénoménal. « A l’intérieur du loft, les candidats restants n’ont pas la moindre idée de l’impact véritable de l’émission. N’oublions pas que c’est la première du genre ; ces cobayes, privés de tout moyen d’information, ne peuvent imaginer le retentissement hors de proportion que provoque leur captivité volontaire. C’est Kenza qui le leur apprend. Après son élimination, alors qu’elle est invitée au prime, Benjamin Castaldi lui donne la possibilité de s’adresser aux enfermés ; elle s’écrie : « Boubou va bien ! », Dans le loft, cette curieuse nouvelle est accueillie par une grande exclamation de joie. Il s’agissait d’un code prévu entre eux, la phrase signifiant que l’émission est un énorme succès » (Dominique Duforest, Télé Réalité de A à Z, 2006). À leur sortie, les lofteurs sont propulsés au rang de stars. Sans aucune préparation, ce nouveau statut n'a pas toujours été facile à vivre pour les participants. Aujourd'hui, 16 ans plus tard, la télé-réalité est toujours présente, voire omniprésente. Elle est devenue une grande machine à la mécanique bien huilée, dont les candidats sont un engrenage. La plupart en connaissent parfaitement les rouages, et s'en servent pour réaliser leurs ambitions.

 

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La recette de la télé-réalité a donc connu de grands changements. La part d'inattendu, d’imprévisibilité et de spontanéité qui pouvait exister chez les tous premiers candidats de Loft Story n’existe plus. La normalité a laissé sa place aux personnages hors normes, mais instaurant leurs propres codes : ceux du candidat de télé-réalité. Buzz à tout prix, coup de gueule, love story, trahison, et plastique irréprochable sont maintenant la norme si l’on souhaite connaître son quart d’heure de gloire. Elles sont blondes à fortes poitrine, parlent avec l’accent chti, partent au quart de tour à cause d’une réflexion d’un autre candidat. Ils sont musclés, bronzés, viennent du sud et aiment séduire. Dans les nouveaux formats comme les Ch’tis, les Marseillais, les Anges de la télé-réalité, les candidats sont quasi interchangeables. « On va retrouver les mêmes candidats, les mêmes stéréotypes de candidats. On a l’impression de voir les mêmes émissions », s’agace Jérémie Atlan, producteur artistique de Secret Story. Pour lui, ce manque de surprise va finir par lasser les téléspectateurs. « La télé-réalité a été la révolution de la télé en 2001, avec le Loft. Je ne sais pas ce que sera la nouvelle révolution, mais on la cherche », sourit-il.  « Une uniformisation des candidats ? » Julien Servat, chargé de casting pour plusieurs télé-réalités, hésite : « Je sais pas. Mais ce qui est sûr c’est qu’ils savent où ils mettent les pieds », pointe-t-il. « On n’est plus au premier Loft avec Loana et Jean Edouard, où ils ne savaient pas ce qu’ils allaient faire ni ce qu’il se passait à l’extérieur. Maintenant il y en a beaucoup qui, quand je leur demande ce qu’ils veulent faire plus tard, me répondent la télé-réalité. Ils prennent ça comme un métier maintenant », confie t-il, fataliste.

 

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Métier : candidat de télé-réalité. Car il s’agit bel et bien d’un vrai métier. En 2009, la Cour de Cassation accorde le statut de salarié aux participants de l’Île de la Tentation. 56 candidats s’étaient regroupés pour intenter un procès à leur employeur, TF1, afin de faire reconnaître leurs droits. Pour Jérémie Assous, leur avocat, interviewé par le Monde, si « a priori, les participants semblaient bénéficier de douze jours de vacances au soleil [...] Ceux-ci étaient constamment dirigés par la production, sur la base d'un scénario préétabli, sans être libres de leurs mouvements. C'est tout le concept de la télé-réalité que de faire croire que la fiction est le réel. En ce sens, il a bien été demandé aux participants de déployer une véritable activité d'acteur, sans que la qualité de la prestation n'ait à être débattue ». Une décision qui s’applique dès lors à plusieurs autres émissions. Un contrat de travail, une rémunération, des indemnités, la participation à un programme de télé-réalité devient donc un emploi à part entière, et les candidats des salariés comme les autres.

 

On réfléchit même sur le long terme, sur l’après de l’émission. La télé-réalité est devenue un tremplin pour se faire connaître, voire même construire une carrière. « Ils savent où ils vont mettre les pieds, ils savent ce qu’ils font, ils ont déjà leur plan de carrière, sur leurs bookings en discothèque, sur les placements de produits qu’ils vont faire sur Snapchat, devenir égérie », nous explique Julien Servat. « Et puis ils ont la chance depuis ces quelques années qu’on les recycle d'émission en émission. Maintenant, être candidat de télé-réalité c’est un business avant tout ». Amélie Neten, l'explosive belge découverte dans Secret Story 4, l'a bien compris : la "reine de la télé-réalité", comme la surnomment les magazines people, a à son actif plus d'une dizaine d'émissions, dont 6 saisons des Anges. Même Élodie, candidate de Moundir et les Aventuriers de l'Amour, qui n’a jamais cherché à profiter de sa toute nouvelle célébrité, l’a remarqué. « Beaucoup de gens viennent vers toi pour que tu fasses de la pub ». Kevin, participant à Secret Story 6, lui, n’a pas hésité. « Aller en boite et gagner deux milles balles pour prendre des photos, c’est génial, c’est un truc à vivre », rigole-t-il. Comme quoi, être passé dans une émission de télé-réalité peut parfois rapporter bien plus qu’un SMIC.

 

« La télé-réalité est

devenue une grande

machine à la

mécanique bien huilée,

dont les candidats sont

un engrenage. »

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« La part d'inattendu,

d’imprévisibilité et de

spontanéité qui pouvait exister

chez les tous premiers

candidats de Loft Story

n’existe plus »

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