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Le 26 avril 2001, pour la première fois de l’histoire de la télévision en France, onze anonymes allaient être filmés en quasi continu sur une période de 2 mois. 1680 heures de tournage où producteurs et téléspectateurs observent les candidats dans leur intimité. 1680 heures hors de la réalité, coupés du monde où les participants se retrouvent enfermés dans un espace unique et clos.

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Devant leur poste de télévision, ce jeudi 26 avril 2001, ils sont 5 millions. Une part d’audience relative à 26%. L’animateur de l’époque, Benjamin Castaldi, annonce la couleur : Loft Story est « une grande première ». « Six garçons et cinq filles vont vivre ensemble une expérience unique. Celle de vivre totalement coupé et isolé du monde extérieur », privé de radio, de presse, de télévision et de téléphone. Une déconnexion totale, que le public de l'émission contemplera avec intrigue et intérêt. Le téléspectateur, qui voit et entend tout, se place en observateur d’humains dans un bocal. Dans « un laboratoire expérimental, un centre concentrationnaire, [ou] une prison » (La fabrication télévisuelle de la star, Gilles Sergé). Une place d’exception qui en fascine certains, et en rebute d’autres.


D’après Guillaume Soulez, auteur de « La télé-réalité, un débat mondial : les métamorphoses de Big Brother », les télé-réalités seraient « fondées sur une mise à l’épreuve de candidats cobayes pour réaliser les conditions d’une expérience psycho-sociale sous les yeux du public, afin de chercher à lui révéler une réalité ». Une réalité qui fascinera lors de la première saison des milliers de Français. Et parmi eux, certains s’intéressent à la réalité 24h/24. Après le fameux épisode de la piscine entre Loana et Jean-Edouard, plus de 100 000 personnes s'abonneront au flux 24/24  sur la chaîne TPS. Un effet de mode s’apparentant à la peur de manquer quelque chose (FOMO pour Fear Of Missing Out).

enfer-me ?

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RETOUR

Hors du temps

" un genre hybride où se même fiction et réelle."

" Très vite la télé-réalité a 

été considéré comme de la

télévision poubelle"

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 Il y a deux grandes promesses quand la

télé-réalité arrive en France : montrer de vrais gens, avec une vérité et une spontanéité [...] et une promesse assez forte de transgression des tabous : ‘ vous allez voir ce que vous n’aviez jamais vu avant à la télévision !’. 

Valérie Patrin-Leclère, maître de conférences au CELSA - Université Paris Sorbonne.

Les candidats, extérieurs au monde, se retrouvent privés d’horloge. Adieu les routines à heure fixe, dans une télé-réalité le temps ne compte pas. Même le tic-tac du four est délicatement supprimé par la production. Cette expérience hors du temps s’accompagne généralement d’une lumière quasi-permanente et automatisée qui force les lofteurs, ou habitants d’une maison, à décaler leurs heures de coucher. A cela s’ajoute déconnexion technologique et informationnelle. Allô le monde ?

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Sur le petit écran de la télé-réalité, vie extérieure et intérieure s’opposent. Entre ces deux univers se dresse généralement un mur infranchissable. Un seul lieu rempli le rôle d’intermédiaire. On l’appelle le confessionnal. Originellement ecclésiastique, il est devenu la pièce maîtresse où les candidats reviennent quotidiennement sur leurs journées et se livrent sans retenu.

 

Pour Valérie Patrin, maître de conférence au CELSA, « le confessionnal est un élément essentiel de la télé-réalité », voire naturel dans ce programme. Face caméra, les candidats n’hésitent pas à se livrer, à casser du sucre sur leurs camarades, à fondre en larme des suites d’une rupture ou à rire aux éclats pour rappeler un événement amusant. Mais pourquoi dans cette petite pièce les langues se délient-elles autant ?

 

Qui dit confessionnal dit isolé des autres. Lors d’un moment au confessionnal, le candidat se retrouve seul face caméra, loin des autres. Un moment de retraite plutôt rare dans ces émissions où vie en communauté rime très souvent avec non-intimité de chacun. Cet isolement, forcé et minoritaire sur l’ensemble d’une journée, va forcer le candidat à vider son sac. « Ça va nourrir ensuite les polémiques. Et cela va servir à fabriquer de la scénarisation, de la dramaturgie au sein du programme » ajoute Valérie Patrin.

Le confessionnal, « c’est le moment où l’on va permettre et faciliter une parole de détestation. »

 

Valérie Patrin

Dans Secret Story, les candidats ont « des interviews tous les jours » rapporte Kévin Emmenecker, candidat durant la sixième saison de l’émission. À chaque télé-réalité sa fréquence. Pour Elodie Meyer, participante de Moundir et les Apprentis Aventuriers diffusé sur W9, le moment confessionnal a lieu  « le matin, le soir ; ou en journée, quand il ne se passe pas grand chose [...] Même si certains rechignent à y aller », personne n’y échappe. Le moment confessionnal est très souvent contraint. Et pour cause, ces plans tournés face caméra façonnent les épisodes d’une télé-réalité. Ils en consolident le contenu. Une quotidienne est un simple enchâssement de deux récits s'emboîtant l’un dans l’autre : les plans de la vie en commun et ceux, plus intimistes, du confessionnal. Une quotidienne compte entre 25 et 43 moments confessionals, si l'on analyse scrupuleusement les quatre principales télé-réalités : Secret Story, Loft Story, Les Marseillais et les Anges de la télé-réalité. Ouvrez l'oeil ! 

L'heure des confidences

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